Gouvernement du Nouveau-Brunswick

Extraits de Mi’kmaq & Maliseet:
First Nations of the Maritimes, par Robert Leavitt

artwork_1-f

Les premiers Européens ayant visité la région des Maritimes ont témoigné avec grand intérêt du savoir-faire des Amérindiens en décrivant les objets que les Mi'kmaqs et les Malécites fabriquaient et les techniques qu'ils utilisaient.

Les Amérindiens fabriquaient tout ce qui leur était nécessaire sans connaître les outils de métal, la poudre de fusil, les tissus, le verre et le bois ouvré.

Ils puisaient leurs ressources à partir de différents éléments naturels, comme la roche, la glaise, pratiquement toutes les parties des plantes et des animaux, les racines, l'écorce et le bois des arbres, la peau, les os, l'ivoire, les bois d'animaux, les coquillages, les poils, la fourrure, les plumes, les piquants de porc-épic et la babiche.

Le seul métal qu'ils utilisaient, le cuivre naturel, était trop mou pour servir de lame, mais pouvait être utilisé pour fabriquer des hameçons.

On en faisait aussi des bagues et des perles en le battant pour l'amincir et en le roulant. On connaît peu les arts décoratifs qui caractérisaient les cultures malécite et micmaque avant l'arrivée des Européens.

Les fibres, le bois, le cuir, les teintures, les peintures et les autres matériaux organiques utilisés par les Amérindiens n'ont pas résisté à l'usure du temps. Seuls quelques dessins ornant de la poterie ou des pierres utilisées pour fabriquer des coutelas et divers pectoraux subsistent.

On a constaté, d'après l'examen de certaines sépultures, que les perles étaient brodées sur les bordures de capuchons ou de collets ou enfilées en colliers ou en bracelets.

Les premiers Européens à visiter la région et ayant vu des artisans travailler ou ayant entendu parler de leurs ouvrages ont décrit, au moyen de textes et d'illustrations, la fabrication de bijoux ainsi que la décoration de vêtements, de murs de tentes et de contenants d'usage domestique.

Denys, Lescarbot et LeClercq, dans leurs écrits sur l'art malécite et Mi'kmaq du temps des premiers contacts des Européens avec les Amérindiens, décrivent un art constitué de représentations d'animaux et de motifs de dentelle.

artwork_2-f

L'art autochtone a évidemment subi l'influence européenne, les nouveaux arrivants ayant apporté avec eux broderies, poteries et bijoux d'Europe. Chaque groupe s'est inspiré de l'autre; les Malécites et les Mi'kmaqs ont rapidement incorporé à leur art certains styles de décoration européens.

Les motifs les plus populaires chez les Amérindiens étaient les formes géométriques dessinées à l'aide d'instruments de mathématiques et les motifs floraux (feuilles, fleurs, vrilles et bourgeons entrelacés).

En alliant ces nouveaux modèles à leurs motifs traditionnels, les Autochtones ont élaboré le motif de la double courbe, devenu le style le plus populaire aujourd'hui dans leur art.

Les Européens apportaient aussi avec eux des techniques et des matériaux pour la fabrication d'outils et d'armes, la confection de vêtements et la décoration. Mi'kmaqs et Malécites n'ont pas tardé à adopter ces matériaux et ces procédés, qu'ils voyaient comme une forme de progrès.

L'efficacité, la durabilité et la commodité des outils et des lames de fer ainsi que des armes à feu surpassaient de beaucoup celles des lames et des pointes de flèche en roche taillée. Il était plus facile d'utiliser des chaudrons de cuivre et de fer que des récipients fabriqués à partir d'écorce de bouleau ou sculptés dans du bois. Ces " commodités modernes " laissaient plus de temps à d'autres occupations, dont l'artisanat.

Certaines de ces occupations secondaires sont devenues sources de revenus pour les Autochtones, à un temps où la colonisation leur restreignait l'accès aux ressources marines et où le commerce des fourrures avait raréfié le gibier.

 

Les perles de verre et les rubans de soie inspirèrent quelques innovations aux artisans autochtones. Dès l'introduction de ces articles dans les communautés autochtones, les Malécites et les Mi'kmaqs les ont utilisés comme éléments décoratifs sur divers objets ou vêtements.

Le style d'habillement lui-même changeait; les vêtements tout faits remplaçaient petit à petit les peaux et les fourrures. Les ciseaux et les aiguilles de métal permettaient de nouveaux travaux, par exemple des broderies avec du crin d'orignal et la pose de rubans en applique.

Les Mi'kmaqs et les Malécites n'ont tout de même pas adopté tout ce qui venait des Européens. Bien que leur mode de vie s'est considérablement modifié au cours du XVIe siècle, ils ont continué à utiliser leurs propres vêtements et équipement, mieux conçus pour les déplacements, la chasse, la pêche et le piégeage.

L'art de fabriquer des outils en pierre taillée a été oublié en un peu plus d'une génération. Mais les canots d'écorce, les habitations, les vêtements confortables, les mocassins, les raquettes, les paniers et les contenants en écorce de bouleau répondaient mieux aux besoins des Amérindiens que leurs équivalents européens. Les colons 

faisaient aussi bon usage de ces objets utiles qu'ils avaient connus en côtoyant les Amérindiens.

À partir de la période de contact entre les deux cultures, certaines techniques de décoration amérindiennes sont devenues populaires en Europe et le sont restées jusqu'à ce jour.

Les wampums, les écorces gravées et les broderies agrémentées de piquants de porc-épic teints et de poils d'orignal étaient particulièrement prisés des collectionneurs et autres amateurs.

Les artistes ont commencé à utiliser des perles de verre, des rubans de soie et des teintures fabriquées en Europe pour décorer des objets en provenance d'Europe, comme des boîtes, des sacs à main, des cache-théières, des cadres, des paniers à coudre et des meubles.

Beaucoup de Canadiens d'origine européenne ont emprunté les motifs des Amérindiens pour leurs propres travaux de décoration et ont appris à faire de la broderie avec des piquants de porcs-épics et des crins d'orignaux.

Les artisans Mi'kmaqs et malécites fabriquaient également des objets qu'ils n'avaient eux-mêmes jamais utilisés auparavant. La demande était particulièrement forte pour l'équipement agricole.

Pendant une bonne partie du XXe siècle, les Amérindiens ont fabriqué des jarres à beurre, des tonneaux, des paniers à pommes de terre et d'autres types de paniers.

L'idée de fabriquer des objets en vue de les vendre et non pas dans le seul but de les utiliser n'était pas nouvelle. À leur arrivée, les Européens ont découvert un réseau commercial florissant; ils ont trouvé des objets qui, d'un échange à l'autre, avaient été transportés à l'intérieur du continent par des Mi'kmaqs et des Malécites bien avant que les nouveaux arrivants foulent le sol de ces régions.

Aujourd'hui, des produits fabriqués à la machine répondent à la totalité des besoins utilitaires des Autochtones et des allochtones.

Les artisans malécites et Mi'kmaqs continuent tout de même à fabriquer des articles utiles à la vie de tous les jours, par exemple des avirons, des paniers et des raquettes. Ils appliquent également les techniques d'arts décoratifs de leurs ancêtres, certaines ayant été transmises, intactes, de génération en génération depuis le temps où les Amérindiens étaient les seuls habitants du continent; d'autres, comme la broderie avec des piquants de porc-épic, ayant connu une renaissance au cours des dernières années. Comme la tradition orale, la spiritualité et l'adaptation à l'environnement, ces techniques constituent un autre moyen d'expression qui aide les peuples à mieux définir leur identité.