Gouvernement du Nouveau-Brunswick

Un moyen de prévention pour réduire l'érosion du sol

L'érosion du sol est le détachement et le transport de particules de soi. Le degré d'érosion dépend de la vitesse d'infiltration de l'eau dans le sol, de la capacité de rétention d'eau et la stabilité structurale du sol ainsi que de l'intensité et la durée des précipitations. Les eaux de ruissellement diminuent généralement la productivité du sol en diminuant la quantité de particules fines, d'éléments nutritifs et de matière organique. Elles peuvent causer une érosion en rigoles ou une grave érosion en ravines lorsque de bonnes mesures préventives ne sont pas prises. Les voies d'eau engazonnées font partie des pratiques de gestion optimales" utilisées pour prévenir la sédimentation en contrôlant le ravinement. Elles filtrent les sédiments des eaux de ruissellement et les empêchent de se déposer dans les cours d'eau.

Les voies d'eau engazonnées peuvent être utilisées seules pour éliminer sans risque les eaux de ruissellement, ou être combinées à des terrasses de canalisation et à d'autres installations anti-érosion. Elles sont fréquemment aménagées dans les dépressions naturelles du champ où l'eau s'accumule, afin d'acheminer l'eau vers une sortie d'évacuation. Les voies d'eau naturelles ou aménagées sont de larges canaux engazonnés et peu profonds qui évacuent l'eau de ruissellement des terres agricoles jusqu'à une sortie convenable (photo 1). De simples sorties d'évacuation, comme des bandes tampons engazonnées, permettent également de freiner l'érosion.

 

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La voie d'eau engazonnée doit être conçue afin d'évacuer sans risque, en 24 heures, le débit d'un orage de 10 ans de récurrence. Lorsque les sorties d'évacuation se trouvent dans une zone résidentielle urbaine, elles doivent être conçues pour un orage de 25 ans de récurrence. Les sorties des voies d'eau engazonnées débouchent généralement sur ' un drain de surface tel qu'un boisé ou un cours d'eau.

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Il est essentiel de concevoir et d'aménager des sorties d'évacuation non érosives. Lorsqu'une voie d'eau engazonnée se déverse dans un fossé ouvert ou dans un cours d'eau, il faut prendre diverses mesures pour dissiper l'énergie du débit de ruissellement et protéger le talus contre l'érosion, notamment:

  • aménager une chute en rochée qui se trouve. à la sortie d'évacuation (photo 2),
  • installer une structure de captage de l'eau à partir du talus qui se trouve à l'extrémité de la voie d'eau engazonnée (figure 1).

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Les voies d'eau engazonnées s'avèrent bénéfiques en protégeant les superficies cultivées où se concentrent les eaux de ruissellement. Il faut prévoir l'enrochement du centre de la voie d'eau ou d'autres mesures de protection spéciales lorsque le débit prévu est supérieur à 2,8 m 3/S (100 pi3/S) et que la vitesse prévue est supérieure à la vitesse acceptable. On peut également utiliser des matelas anti-érosion permanent non dégradables ou d'autres matériels anti-érosion pour évacuer sans risque le débit de pointe. Les vitesses maximales acceptables sont présentées au tableau 1.

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Forme des voies d'eau engazonnées

La coupe transversale des voies d'eau engazonnées est généralement de forme parabolique (figure 2), afin d'atténuer le risque de sinuosité. Sur les terrains très escarpés, les voies d'eau peuvent avoir une coupe transversale trapézoïdale, qui est plus efficace pour un plus grand débit d'eau de ruissellement. Il est plus difficile de construire et d'entretenir la voie d'eau de forme trapézoïdale, mais son rendement hydraulique est très bon. On recommande d'aménager des pentes latérales ayant une inclinaison de 6:1 à 8:1 pour faciliter la traverse de la voie d'eau et les travaux agricoles. Cette inclinaison ralentit la vitesse de l'eau et diminue l'érodabilîté du sol.

 

La vitesse de l'eau peut augmenter considérablement lorsque la voie d'eau est trop longue et avec une variation de pente.

L'enrochement de la voie ou l'installation de ceintures de pierres angulaires ou chute enrochée permet de dissiper l'énergie et de maintenir le débit à une vitesse non érosive. Lorsque la voie d'eau est traversée fréquemment par l'équipement agricole, il peut s'avérer nécessaire d'installer un système de drainage souterrain. La distance entre les drains et le centre de la voie d'eau doit représenter au moins le quart de la largeur totale de la voie d'eau. Les drains doivent être installés avec précaution près d'un côté ou des deux côtés de la voie d'eau et ils doivent longer la voie d'eau sur toute sa longueur. Les sorties des drains doivent être écartées de la sortie d'évacuation de la voie d'eau et protégées adéquatement.

 

Dimensions des voles d'eau engazonnées

Les dimensions de la voie d'eau varient en fonction du volume d'eau de ruissellement qu'elle doit évacuer et compte tenu de son utilisation éventuelle comme sortie d'évacuation pour un autre système anti-érosion. La profondeur minimale de la voie d'eau engazonnée est de 0,3 mètre (un pied). On augmente la profondeur lorsqu'il faut évacuer correctement l'eau provenant de terrasses de canalisation le drainage des rangs utilisés en vue d'obtenir un meilleur résultat. La largeur de la voie d'eau est d'au moins 8 m (26 pi) pour faciliter les travaux agricoles tels que le passage des équipements aratoires, l'ensemencement, et le fauchage. La largeur est généralement inférieure à 20 m (66 pi), sauf lorsqu'il est impossible d'utiliser d'autres sorties ou méthodes convenables.

 

Période de construction, ensemencement et protection initiale

Les voies d'eau engazonnées doivent être construites et engazonnées avant la fin d'août pour que la couverture végétale s'implante convenablement et puisse résister au débit érosif des eaux de ruissellement à l'automne et au printemps. Lorsque la construction a lieu en automne, on recommande fortement d'utiliser une toile anti-érosion pour réduire les dégâts éventuels le printemps suivant. On débute la construction lorsque le sol n'est pas trop humide et se travaille bien, et quand on sait que les travaux seront achevés dans une période relativement brève. La construction doit être faite au moment où elle perturbe le moins les cultures sarclées. De plus, il faut construire perpendiculairement au sens du travail du sol pour éviter que l'application d'herbicides avec arrosoir endommagent la couverture végétale de la voie d'eau.

Les voies d'eau sont ensemencées avec un mélange de graminées qui se colonisent par des rhizomes. Le mélange recommandé pour les champs de pommes de terre du Nouveau-Brunswick comprend 70 p. 100 de fétuque élevée, 20 p. 100 de fétuque rouge traçante et 10 p. 100 d'agrostide stolonifère. Ce mélange a donné de bons résultats lorsqu'on l'a semé à la volée à raison de 55 kg/ha (50 lb/a). Le chaulage est nécessaire dans la plupart des cas pour augmenter le pH du sol, et une fertilisation convenable. D'autres mélanges peuvent

être utilisés dans les sols mal draines, comme l'alpiste roseau combiné à l'agrostide stolonifère. On recommande aussi de contre-ensemencer le mélange avec une céréale à raison de 70 kg/ha (60 lb/a) pour favoriser la pousse rapide de la couverture végétale; utiliser une céréale de printemps lorsque le semis est fait avant la fin de juillet, et une céréale d'hiver pour un semis plus tardif. L'application de paille dans la voie d'eau ensemencée offre une protection contre un ruissellement prématuré.

Les matelas anti-érosion sont de plus en plus populaires et fournissent une protection temporaire contre l'érosion durant la période d'implantation de la couverture végétale. Ils procurent effectivement une très bonne protection contre les fortes précipitations qui surviennent avant que la semence soit bien implantée. Le matelas canalise les eaux de ruissellement tout en s'incrustant au sol, créant ainsi un effet agglutinant, et diminue l'entretien nécessaire dans la voie d'eau. Le matelas emprisonne les sédiments entre les rigoles, et il atténue les effets néfastes des orages occasionnels. Plusieurs types de matelas sont accessibles :en nylon, en jute, en fibre de noix de coco et en paille enchevêtrée.

Construction et entretien

Les machines recommandées pour la construction des voies d'eau engazonnées sont les niveleuses automotrices, les camions à benne basculante et les tracteurs à chenilles. L'équipement de travail du sol peut servir pour le nivelage final du terrain et la préparation du lit de semence. Les travaux préparatoires à l'ensemencement ne doivent pas être effectués dans le sens de la pente pour éviter la formation de rigoles et ne pas réduire la stabilité de la voie d'eau.

Bénéfices des voies d'eau engazonnées

Il n'y a rien de plus désolant qu'un ravin dégarni qui divise une terre agricole productive. L'aménagement de voies d'eau engazonnées fait partie des pratiques de gestion optimale pour la lutte contre la sédimentation. Elles améliorent la valeur productive d'une terre agricole tout en accaparant un très faible espace, et elles constituent une très bonne pratique agro-environnementale.

Mode de construction recommandé

  1. Pour concevoir et construire des voies d'eau engazonnées qui feront partie d'un réseau servant à contrôler les eaux de ruissellement, il faut obtenir l'autorisation écrite des propriétaires fonciers qui se trouvent en aval ou près de l'aménagement prévu, ou celle du ministère des Transports si on utilise les fossés le long des routes.
  2. Un permis de modification des cours d'eau peut être exigé pour les voies d'eau dont la sortie d'évacuation débouche sur un cours d'eau naturel comme un lac, une rivière ou un important cours d'eau.
  3. Les arbres, les broussailles, les obstacles et tout autre matériel doivent être sortis du lieu des travaux et éliminés d'une manière conforme aux règlements sur l'environnement et au mode de fonctionnement de la voie d'eau.
  4. La voie d'eau doit être creusée ou tracée conformément aux directives et aux dimensions établies par des techniciens en génie qualifiés. Elle doit aussi être exempte de débris ou d'autres irrégularités qui peuvent nuire au débit normal.
  5. Il faut préserver la couche arable du sol en enlevant cette couche de terre de surface du lieu d'aménagement et l'empiler à , part. Après avoir aménagé la voie d'eau comme prévu, il faut étendre cette couche de terre arable à une épaisseur d'au moins 15 cm afin de favoriser l'établissement d'une bonne croissance végétale.
  6. Tout le matériel de remplissage doit être bien compacté ou utiliser des pierres des champs pour prévenir un tassement excessif ou inégal qui causerait des dégâts dans la voie d'eau.
  7. Le sous-sol non utilisé pour la construction de la voie d'eau doit servir pour le nivellement du terrain, pour améliorer le drainage pour les cultures en rangs des champs adjacents, ou pour construire des voies d'accès; on peut aussi l'empiler à l'écart de la voie d'eau.
  8. Une fois que les voies d'eau engazonnées ont reçu la chaux et les engrais nécessaires, le mélange de graminées recommandé est mis en terre et entretenu pour obtenir une couverture végétale exempte de mauvaises herbes; la fauche deux fois par année sert à épaissir le gazon.
  9. Toutes les activités de construction sont accomplies de manière à réduire l'érosion du sol. La construction doit être faite à une période favorable à l'ensemencement pour protéger la voie d'eau contre le ruissellement à l'automne et au printemps.
  10. Il vaut mieux utiliser des matelas anti-érosion que des fossés temporaires pour favoriser la bonne implantation de la couverture végétale dans la voie d'eau. La largeur du matelas doit être égale à la largeur requise de la voie d'eau pour évacuer sans risque, en .24 heures, le débit d'un orage de cinq ans de récurrence.
  11. Les voies d'eau engazonnées ne doivent pas servir de chemin d'accès pour le passage d'animaux ou de machines agricoles. Un petit sillonnage peut se transformer en ravin et détruire la voie d'eau.
  12. Il est essentiel de souligner l'importance de concevoir et construire des sorties d'évacuation non érosives. Les sorties peuvent être protégées par une chute enrochée ou par d'autres dissipateurs d'énergie (photo 2).
  13. Des vérifications régulières doivent être faites chaque année pour combler les petites rigoles avec le matériel approprié et réensemencer avant que la voie d'eau soit endommagée par les débits concentrés.