Gouvernement du Nouveau-Brunswick

Bulletin sur la nutrition
95.1 - Septembre 1995
Murray Snowdon, agronome, spécialiste en nutrition animale

Une grande partie du soja cultivé est servi aux animaux à l'état naturel. On s'éloigne ainsi de la pratique habituelle consistant à extraire l'huile de soja pour la consommation humaine et à servir le tourteau restant au bétail. Comme il existe des variétés de soja qui mûrissent bien dans les Maritimes, les producteurs sont très intéressés à inclure le soja dans leur programme de culture et d'alimentation du bétail.

VALEUR NUTRITIVE

Le soja entier renferme la même combinaison d'acides aminés que celle qu'on retrouve dans le tourteau de soja, mais le taux de protéines et les acides aminés individuels sont dilués par les 18 p. 100 d'huile qu'il contient (voir le tableau 1).

TABLEAU 1. Valeur nutritive comparée du soja entier et du tourteau de soja servis au bétail.

  Soja entier Tourteau de soja
 
% de protéines 36 48
 
% de graisses 1,8 1,5
 
ÉNl, Mcal/kg - cru 1,8 -
 
ÉNl, Mcal/kg - rôti 2,0 1,8
 
% UNT - cru 77 -
 
  - rôti 85 77
 
ÉD - Porc, kcal/kg 4 200 3 680
 
% de lysine 2,3 2,9
 
% de méthionine 0,46 0,52
 
%, PDI - cru 30 -
 
  - rôti 50-60 35
 
% de calcium 0,28 0,35
 
% de phosphore 0,66 0,75

* Le tourteau de soja est soumis à la chaleur durant la transformation.

Le soja entier est effectivement composé de tourteau et d'huile de soja, mais sa valeur énergétique n'est pas aussi élevée qu'on pourrait s'y attendre compte tenu de ses deux composantes. On ne connaît pas exactement le motif de cet écart, mais un facteur probable serait le coefficient de digestibilité des graisses plus bas que prévu. Le mauvais traitement des graines ou un régime mal formulé sont probablement d'autres facteurs responsables des valeurs énergétiques plus basses que prévu.

Le soja entier renferme des inhibiteurs de trypsine qui nuisent à la digestion des protéines. Ces inhibiteurs doivent être détruits à la chaleur avant que le soja soit servi aux porcs ou aux autres non-ruminants.

MÉTHODES DE TRANSFORMATION

Il existe un grand nombre de méthodes de transformation du soja, mais aucune ne semble présenter un net avantage par rapport aux autres en ce qui concerne la valeur nutritive du produit fini. Les paragraphes suivants décrivent certaines des méthodes utilisées pour la transformation du soja.

1. Torréfaction à la flamme de gaz propane. Avec cette méthode, les graines de soja sont directement exposées à la flamme. Si la température est trop élevée, les éléments nutritifs à la surface de la graine peuvent être détruits en partie, tandis que le centre de la graine reste cru. Une basse température diminue le risque de carbonisation de la surface de la graine, mais elle réduit également la vitesse de transformation. La torréfaction à la flamme directe supprime une partie des mycotoxines présentes dans le soja et permet de combiner les étapes du séchage et de la cuisson en une seule opération.

2. Lit fluidisé. Ce procédé permet de cuire le soja dans un fluide caloriporteur qui le maintient en suspension. Ce fluide est de l'air dans la plupart des cas, et les graines de soja sont transportées à travers l'unité de chauffage sur un lit d'air chaud. Les risques de carbonisation sont généralement faibles avec cette méthode, qui permet d'éliminer une partie des mycotoxines grâce au mouvement créé par l'air chaud, et non par brûlage. Cette méthode peut également être utilisée pour sécher les graines.

3. Extrusion à sec. Dans ce procédé, les graines de soja sont séchées et moulues avant d'être passées dans une filière. La friction ainsi créée produit suffisamment de chaleur pour détruire la plupart des inhibiteurs de trypsine. L'extrusion libère l'huile contenue dans la graine, ce qui rend le produit fini huileux au toucher. Les graines traitées par cette méthode semblent donner de meilleurs résultats que les graines torréfiées pour l'alimentation des porcs, probablement à cause de la pellicule d'huile qui favorise la digestion. Par contre, chez les ruminants, cette huile risque de nuire à la fonction du rumen.

4. Micronisation. Cette méthode consiste à exposer les graines à une chaleur sèche produite par rayonnement infrarouge.

5. Granulation. La granulation ne permet pas de détruire les inhibiteurs de trypsine, et elle ne peut être substituée au chauffage du soja. Cette méthode permet cependant d'améliorer l'assimilation du soja par les monogastriques, ce qui rend plus intéressante l'option d'inclure le soja torréfié dans les aliments industriels.

TRAITEMENT THERMIQUE

Le chauffage du soja est nécessaire pour abaisser les taux d'inhibiteurs de trypsine dans les aliments destinés aux porcs et aux poulets. Le traitement thermique du soja n'est pas nécessaire pour les ruminants, mais il faut tenir compte des avantages suivants que procure la torréfaction ou l'extrusion du soja.

1. Meilleure appétibilité.

2. Amélioration des taux de protéines non dégradées chez les ruminants (protéines non dégradable).

3. Accroissement de la densité d'énergie lorsqu'une partie de l'enveloppe est enlevée.

4. Le soja torréfié peut être incorporé sans risque aux régimes pour ruminants qui contiennent de l'urée, car la torréfaction détruit l'uréase.

5. Amélioration de la digestibilité des hydrates de carbone.

6. Meilleure conservation.

Directives pour la torréfaction

Devant le grand nombre de variables en cause (variété de soja, taux d'humidité, traitement thermique, différentes périodes et températures de cuisson), les producteurs doivent établir leurs propres paramètres de transformation. De plus, le choix de la méthode de torréfaction dépend beaucoup des animaux auxquels le soja est destiné (ruminants ou monogastriques).

Évaluation de la qualité de la torréfaction

Il existe plusieurs façon d'évaluer la qualité de la torréfaction des graines de soja. Le choix de la méthode d'évaluation dépend des animaux auxquels le soja est destiné, du coût de l'analyse et du délai d'exécution.

1. Taux d'inhibiteurs de trypsine. Pour les monogastriques, et surtout pour les jeunes animaux, il faut réduire considérablement le taux d'inhibiteurs de trypsine des graines crues. On peut se procurer une trousse d'analyse calorimétrique pour évaluer le taux d'inhibiteurs de trypsine (voir le point 3 ci-après).

Certains laboratoires peuvent évaluer plus précisément ce taux pour les producteurs qui cherchent à améliorer leurs méthodes de torréfaction.

2. Dépistage de l'uréase. En l'absence d'urée dans le régime, l'uréase ne constitue pas un problème important, mais sa présence indique que des inhibiteurs de trypsine font encore partie de l'aliment. Le test peut être effectué en laboratoire ou sur les lieux de production avec une trousse d'analyse calorimétrique. Il permet de déterminer qu'une torréfaction est suffisante, mais il ne permet pas de déceler une exposition à la chaleur excessive.

3. Azote insoluble au détergent acide. Il s'agit d'un test souvent utilisé pour détecter les dégâts causés par la chaleur et de mesurer la réduction de la digestibilité des protéines dans les ensilages. On l'emploie dans le même but pour le soja. Il peut être utilisé seul, ou combiné au test de l'azote insoluble au protéase, pour obtenir une évaluation relativement exacte du taux de protéines non dégradable.

4. Dépistage de la lipase. Ce test peut être effectué sur les lieux de production avec une trousse d'analyse calorimétrique, et il permet d'évaluer le taux de protéines non dégradable. Comme la lipase peut supporter une plus grande chaleur que l'uréase, elle sert d'indicateur pour la transformation à température élevée. La lipase soumise à l'analyse calorimétrique permet de déterminer le taux de protéines non dégradable.

5. Test de l'indice de dispersabilité protéique. L'analyse permet d'évaluer la dispersabilité protéique dans l'eau. Plus la chaleur augmente, plus la dispersabilité protéique du produit exposé diminue. Ce test comporte certaines limitations, mais il s'agit d'une méthode rapide et relativement économique pour vérifier la qualité de la torréfaction des graines servies aux ruminants. Ce test est très populaire aux États-Unis.

6. Évaluation visuelle. Lorsque les autres méthodes ne sont pas disponibles, on peut évaluer les graines selon la couleur et le goût. Elles doivent être de couleur brun doré (absence totale ou presque de graines noircies) et ne pas avoir de goût amer ou aigre.

VALEUR MONÉTAIRE

Les constantes arithmétiques de Peterson permettent de comparer la valeur énergétique et protéique du soja entier à celle des tourteaux de maïs et de soja. La valeur monétaire du soja entier représente 85 à 90 p. 100 de celle du tourteau de soja, et la valeur du soja entier torréfié représente 90 à 95 p. 100 de celle du tourteau de soja.

Pour obtenir une valeur plus précise, chaque producteur doit établir une formule de moindre coût compte tenu des caractéristiques de la ration et des aliments disponibles.

Dans les régimes à haut rendement énergétique, les graines de soja ont une plus grande valeur puisqu'elles remplacent les matières grasses de la formulation. Dans les régimes pour vaches lactantes ou pour animaux en pleine croissance, le soja est encore plus rentable en raison de la valeur de ses protéines non dégradable, et il peut avoir une valeur monétaire supérieure à celle du tourteau de soja. Dans les cas de faible productivité, où les oléagineux peuvent être remplacés par des sources d'énergie et de protéines moins coûteuses, le soja a une valeur réduite.

La connaissance des facteurs qui modifient la valeur d'un aliment permet de prendre des décisions plus éclairées en matière d'achat et de vente. Comme la plupart des graines sont traitées à la chaleur avant d'être servies aux animaux, le présent article traite principalement des graines de soja torréfiées.

TAUX DE MATIÈRE SÈCHE ET PERTE DE MASSE

Le soja torréfié contient beaucoup moins d'humidité que le soja entier, un important facteur pour l'établissement du prix. Même les graines déjà séchées perdent encore de l'humidité à la torréfaction. Il arrive souvent que les graines sortant du torréfacteur n'aient que 3 à 8 p. 100 d'humidité, comparativement à 10 à 14 p. 100 d'humidité dans la plupart des aliments

« séchés ». Ainsi, la torréfaction pourrait réduire le taux d'humidité de 14 à 4 p. 100, soit une perte

« évidente » de 10 p. 100 par rapport au poids original. En fait, il ne s'agit pas d'une perte pour l'acheteur ou le producteur de soja, car ils ne perdent que l'humidité et se retrouvent avec un ingrédient alimentaire plus nutritif et condensé.

Le taux de matière sèche du soja torréfié dépend d'un certain nombre de facteurs, dont le taux de matière sèche avant l'entrée dans le torréfacteur, la température dans le torréfacteur et la durée de la torréfaction. Le soja est à son niveau le plus sec immédiatement après la torréfaction, mais son taux d'humidité peut augmenter faiblement dans le lieu de conservation compte tenu du climat ambiant.

À la perte d'humidité s'ajoute l'élimination des souillures et des enveloppes des graines pendant la manutention et la torréfaction. La perte réelle varie en fonction des graines mêmes, de chaque opération de torréfaction et des tentatives délibérées pour éliminer ces matières, le cas échéant. Lorsqu'une quantité de soja est torréfiée sur commande et que le client récupère ses graines, toute réduction de poids est une perte de masse réelle. Toutefois, lorsque le produit de chaque client n'est pas traité séparément, le transformateur doit rectifier le poids de soja (torréfaction comptable) qui est retourné à chaque client. La plupart des usines de torréfaction prévoient une perte de masse totale d'environ 13 p. 100, y compris l'humidité, pour le soja à 86 p. 100 de matière sèche. Avec une perte de 13 p. 100, le traitement de 100 tonnes de soja entier donne 87 tonnes de soja torréfié. Si l'on a payé 270 $ la tonne pour les cent tonnes de soja entier à 86 p. 100 de matière sèche, les 87 tonnes obtenues après la torréfaction devraient être vendues 310 $ la tonne pour compenser la perte de masse de 13 p. 100. Dans ce 40 $ d'augmentation, 28 $ sont attribuables à la perte d'humidité et le reste, à la perte réelle de matière sèche (enveloppes, etc.)

COÛT DE LA TORRÉFACTION

Le coût de la torréfaction peut varier d'un endroit à l'autre. Cette variation est causée en partie par les frais associés à la perte de masse, et les autres facteurs possibles sont le coût du combustible, la quantité de soja traitée, le coût en capital et le degré de concurrence du marché.

Lorsque la torréfaction coûte 35 $ la tonne de soja entier, il faut ajouter 40 $ la tonne pour le soja torréfié afin de couvrir les frais de torréfaction. L'addition de ce montant aux 310 $ calculés précédemment porte le prix final à 350 $ la tonne de soja torréfié, et ce pour du soja qui coûtait 270 $ la tonne avant la torréfaction. Ce prix final ne comprend pas les autres frais de manutention et de transport ni la majoration du prix. N'oubliez pas qu'une grande partie de cette augmentation de prix est simplement attribuable à la perte d'humidité, et la valeur monétaire initiale du soja doit être appliquée à une quantité réduite.

La torréfaction du soja est souvent avantageuse, mais elle n'est pas nécessaire pour l'alimentation des ruminants. Il arrive que des agriculteurs cultivant le soja n'aient pas facilement accès à un centre de torréfaction, et ils peuvent alors envisager de servir le soja entier à leurs animaux. Il faut consulter un spécialiste du bétail pour connaître les rations que l'on peut servir avec du soja entier.

MODÈLE DE RÉPARTITION DU PRIX PAR TONNE DE SOJA TORRÉFIÉ

Coût du soja entier 270 $ @ 86 % de ms,
c.-à-d. 314 $/t de ms
Perte d'humidité 28 $
Autre perte de masse 12 $
Torréfaction (35 $/t humide) 40 $

Total 350 $ @ 96 % de ms, c.-à-d. 365 $/t de ms

** Il s'ajoute parfois d'autres coûts comme les frais de transport à destination et en provenance du centre de torréfaction ainsi que des frais d'entreposage.

 

TEMPÉRATURE DE TORRÉFACTION

Le soja qui est torréfié pour augmenter la proportion de protéines non-dégradable des bovins laitiers exige beaucoup plus de chaleur que le soja torréfié pour l'alimentation des porcs. Si l'exploitant du centre de torréfaction imputait directement ces coûts aux clients qui élèvent des bovins laitiers, ces clients paieraient alors davantage pour le soja torréfié que ceux qui élèvent des porcs. Et comme le soja torréfié à température élevée est plus riche en matière sèche, ce facteur contribue également à élever le coût du soja qui est traité à plus haute température.

Les clients doivent être convaincus que le soja qu'ils achètent a été torréfié suffisamment, mais pas trop, pour les animaux à qui il est destiné.

TENEUR EN HUILE

Le soja a une valeur additionnelle pour les régimes qui exigent un supplément d'énergie. L'huile présente dans le soja (jusqu'à 20 p. 100 de la matière sèche) permet à l'animal de consommer plus de calories sans absorber plus d'aliments. Pour les animaux qui ont besoin d'un régime à haut rendement énergétique, comme les poulets à griller, les vaches lactantes et les truies lactantes, cette énergie additionnelle peut être très utile pour accroître la performance de l'animal. Dans ces cas, le prix de l'huile de soja peut se comparer à celui d'autres sources de matières grasses comme le suif.

Un autre facteur qui est avantageux pour l'agriculteur, mais qui l'est moins pour le fabricant d'aliments, est la facilité avec laquelle on peut enrichir un régime en matières grasses au moyen du soja, comparativement à toute autre méthode d'enrichissement en matières grasses utilisée à la ferme. Il est difficile de quantifier la valeur monétaire de cet avantage.

Les matières grasses fournies par le soja n'ont pas une aussi grande valeur dans l'alimentation des animaux dont la productivité est faible, comme les génisses laitières de remplacement; dans ce cas, il est probablement moins coûteux de servir plus de céréales que d'incorporer du soja au régime.

Comme la teneur en huile fluctue selon la variété et les conditions de culture, certains acheteurs incluent le taux d'huile dans leur formule du prix.

TENEUR EN PROTÉINES

Puisque le soja est principalement acheté comme source de protéines, il est sûr que sa teneur en protéines est un facteur important. Et la teneur en protéines du soja fluctue selon la variété et les conditions de culture, comme c'est le cas pour l'huile.

On ne sait pas exactement quel est le taux de protéines que devrait renfermer le soja produit dans les Maritimes. Une partie de cette incertitude provient du fait que l'on indique souvent la teneur en protéines par rapport au taux de matière sèche. Par exemple, le soja dont le teneur en protéines représente 40 p. 100 de la matière sèche aurait une teneur en protéines de 34 p. 100 à la consommation quand le taux de matière sèche à la récolte est de 85 p. 100. À la sortie du torréfacteur, le soja à 90 p. 100 de matière sèche aurait une teneur en protéines de 36 p. 100, et cette proportion pourrait grimper à 38 p. 100 si la teneur en matière sèche était de 96 p. 100. La plupart du soja produit au Nouveau-Brunswick a une teneur en protéines représentant 39 à 43 p. 100 de la matière sèche.

PROTÉINES NON DÉGRADABLE (PDN)

Lorsqu'il faut compter sur une plus grande quantité de protéines non dégradable, la proportion de ces protéines dans le soja torréfié à point ajoute à sa valeur. L'importance de cet avantage dépend des autres sources d'aliments disponibles qui peuvent fournir ces protéines au moment voulu. Les animaux qui profitent normalement le plus de ce genre de protéines, tout comme des matières grasses, sont ceux qui ont une grande productivité, comme les vaches en début de lactation. Le soja torréfié a un taux de protéines non dégradable de 45 à 55 p. 100, comparativement à un taux de 25 à 30 p. 100 pour le soja entier.

PRIX DU MARCHÉ

Le marché du soja torréfié est étendu et bien établi au Wisconsin, et environ 45 usines de torréfaction traitent le tiers du soja produit dans cet État. Le soja torréfié est servi presque exclusivement aux bovins laitiers, et son prix est supérieur à celui du SBM 48 % (tourteau de soja). Au moment de la rédaction du présent rapport, en septembre 1994, les usines du Wisconsin vendaient le tourteau de soja environ 308 $ la tonne métrique et le soja torréfié, 370 $ la tonne métrique (valeurs converties en $ CAN par tonne métrique). Ces prix diffèrent beaucoup de ceux en vigueur dans les Maritimes : aux élévateurs de l'Île-du-Prince-Édouard cette semaine, le tourteau de soja se vendait 385 $ la tonne métrique et le soja torréfié, 329 $ la tonne métrique. Comme on peut le constater, le soja torréfié se vend plus cher que le tourteau au Wisconsin, mais dans notre région, le tourteau coûte plus cher.

ENTREPOSAGE

Pour que le soja se conserve bien, son taux d'humidité ne doit pas dépasser 14 p. 100. La haute teneur en huile du soja entier pose d'autres problèmes de conservation qui s'ajoutent à ceux liés à l'humidité. Le soja cru moulu est très instable, et il risque de se détériorer à l'entreposage, surtout par temps chaud. Le traitement adéquat des graines à la chaleur détruit une partie des enzymes naturels, ce qui stabilise l'état de conservation des graines traitées.

BIENFAITS POSSIBLES DU SOJA ENTIER DANS L'ALIMENTATION DU BÉTAIL

1. Le soja entier remplace avantageusement le tourteau de soja et les matières grasses dans les cas qui exigent un régime à haute teneur énergétique.

2. Lorsque l'apport énergétique est suffisant sans qu'il soit nécessaire d'ajouter des matières grasses, le soja est en concurrence avec des céréales au plan de la valeur énergétique, et sa valeur est moindre que lorsqu'il entre en concurrence avec les matières grasses.

3. Lorsqu'on donne du soja à des animaux qui ont déjà un rendement conforme à leur potentiel génétique, le surplus énergétique fourni par le soja n'entraîne pas une amélioration de la croissance, mais il améliore l'indice de consommation.

4. Le soja torréfié à point peut être utilisé comme source de protéines non dégradable pour les ruminants. Ils ont alors moins besoin de protéines tirées de sources moins appétentes comme la farine de viande et la farine de sang. On maximise la valeur monétaire du soja en l'utilisant comme source d'énergie concentrée et pour remplacer des sources de protéines animales plus coûteuses.

5. L'huile contenue dans le soja aide à réduire la proportion de poussières dans les rations moulues.

PROBLÈMES ÉVENTUELS

1. Le soja mal torréfié contient beaucoup d'inhibiteurs de la trypsine, et il réduit la performance des porcs, de la volaille et des jeunes veaux.

2. Le soja soumis à une chaleur excessive renferme plus de protéines non assimilables qui ne peuvent pas être digérées par les ruminants et les monogastriques. On peut déterminer la présence de ces protéines avec le test de l'azote insoluble au détergent acide.

3. Lorsqu'on veut incorporer d'importantes quantités de soja au régime alimentaire, il faut prendre soin de rééquilibrer la ration afin de maintenir une proportion adéquate d'énergie par rapport aux autres éléments nutritifs, particulièrement les protéines.

4. Comme l'huile contenue dans le soja moulu tend à rancir, il faut en moudre régulièrement de petites quantités, surtout par temps chaud.

5. Une forte proportion de soja entier dans l'alimentation des porcs peut causer le ramollissement de la graisse de la carcasse.

6. Lorsque les vaches en lactation consomment de grandes quantités de soja, les matières grasses sont moins saturées et plus sensibles à l'oxydation.

7. Les fortes concentrations de soja dans les rations pour vaches en lactation contribuent souvent à réduire le taux de matières grasses du lait, partiellement à cause de l'effet négatif de l'huile de soja sur la fermentation ruminale et sur la digestion des fibres.

8. Le soja, comme toutes les autres sources de matières grasses, a souvent pour effet d'abaisser la teneur en protéines du lait.

9. Lorsque la ration est trop riche en soja et que la fonction ruminale est perturbée, la consommation de matière sèche décline. Dans ce cas, l'énergie ingérée risque de décroître en dépit de la haute teneur énergétique du régime alimentaire. Le dérèglement de la fonction ruminale entraîne aussi une mauvaise digestion des fibres, ce qui diminue la valeur alimentaire des fourrages consommés.

LIGNES DIRECTRICES POUR L'ALIMENTATION

A. Porcs

Dans de récents résultats de recherches sur l'alimentation des porcs avec du soja, on indiquait que 90 p. 100 des essais avaient révélé une augmentation de l'indice de consommation et que 55 p. 100 des essais avaient révélé un meilleur taux de gain. Les lignes directrices suivantes devraient accroître les chances de succès du producteur qui alimente ses porcs avec du soja entier.

1. Tenir compte du fait qu'à poids égal, le soja entier contient 75 p. 100 du taux de protéines présent dans le SBM 48 %, et que le soja entier ne peut donc pas remplacer le tourteau à quantité égale.

2. Le soja entier ne doit pas constituer plus de 15 à 20 p. 100 du régime de croissance-finition des porcs, ni plus de 25 p. 100 du régime des truies. Le taux exact de soja dépend en partie de la quantité d'huile présente dans les autres ingrédients du régime.

3. Ajouter 5 UI de vitamine E par kilogramme d'aliments pour chaque point de pourcentage de matières grasses ajoutées au régime alimentaire.

4. Augmenter le taux de protéines alimentaires afin de conserver un bon rapport protéines / énergie, et compenser la baisse de consommation des matières sèches consécutive à la consommation de soja entier.

5. S'assurer que la torréfaction est convenable et que les taux d'inhibiteurs de la trypsine sont bas.

6. Le traitement du soja à une chaleur excessive peut entraîner certains problèmes. On recommande de faire analyser en laboratoire la solubilité protéique si l'apparence des graines de soja ou le rendement des animaux semble indiquer un problème. Quand le soja a été traité à une chaleur excessive, il faut compenser en augmentant la teneur en protéines du régime.

B. Ruminants

Il est difficile d'interpréter les résultats des études publiées sur la consommation de soja entier par les ruminants. Un grand nombre d'essais semblent avoir donné des résultats décevants, comme par exemple l'absence d'une modification de la production avec du soja entier, contrairement à celle obtenue avec du tourteau de soja. D'autres essais ont toutefois donné des résultats très encourageants. Le type de fourrage, le degré de cuisson et de broyage du soja, la quantité d'aliments ingérés et la productivité animale sont tous des éléments qui peuvent avoir d'importants effets sur le rendement. On accroît ses chances de succès en ajoutant une quantité raisonnable de soja bien torréfié à un régime équilibré en fibres, en protéines non dégradable et en minéraux.

1. Il n'est pas nécessaire de donner du soja torréfié aux ruminants, mais on peut utiliser la torréfaction pour sécher le soja et réduire ainsi les taux de mycotoxines, augmenter le taux de protéines non dégradable et accroître le taux d'ingestion maximal.

2. La consommation de soja cru peut réduire la prise alimentaire, et elle ne stimule pas habituellement la production laitière comparativement au tourteau de soja. Le taux de matières grasses du lait reste sensiblement uniforme, mais le taux de protéines du lait décroît souvent avec la consommation de soja cru.

La consommation de soja torréfié ne réduit pas habituellement la prise alimentaire et augmente souvent le production laitière, surtout en début de lactation. Les effets du soja torréfié sur la composition du lait sont semblables à ceux du soja cru. Le taux de matières grasses du lait peut augmenter ou décroître, mais l'écart est habituellement faible. De plus, le taux de protéines du lait décroît souvent lorsque les vaches consomment du soja torréfié.

Le soja traité par extrusion favorise habituellement la production laitière, mais il risque plus de faire baisser les taux de matières grasses et de protéines du lait que le soja torréfié.

3. Les vaches laitières ne doivent pas recevoir plus de 3,5 kg de soja torréfié ou 2 kg de soja cru par jour.

4. Le régime des bovins de boucherie ne doit pas comprendre plus de 5 p. 100 de matières grasses additionnelles provenant du soja. Par exemple, un animal qui consomme 7 kg de matière sèche peut consommer environ 1,7 kg de soja entier.

5. Lorsque le régime alimentaire comprend une importante proportion de matières grasses provenant du soja ou d'une autre source, il faut augmenter les taux de calcium et de magnésium d'environ 15 p. 100.

6. Comme les microorganismes du rumen ne digèrent pas les matières grasses et les huiles, il faut veiller à fournir suffisamment d'hydrates de carbone pour maintenir la productivité ruminale.

7. Pour permettre à l'animal de bien utiliser l'huile de soja à l'étape postruminale, il faut augmenter le taux de protéines non dégradable. En pratique, on peut ajouter un pour cent de protéines non dégradable pour chaque trois pour cent de matières grasses ajoutées au régime alimentaire.

8. Lorsqu'on utilise du soja torréfié pour remplacer d'autres sources de protéines non dégradable, il faut faire analyser le soja torréfié en laboratoire pour s'assurer qu'il fournit le taux voulu de protéines non dégradable.

9. Lorsqu'on utilise du soja entier, la valeur des protéines non dégradable augmente, mais la possibilité que le soja ne soit pas digéré par l'animal augmente aussi. Avec du soja finement moulu, le taux de protéines non dégradable diminue et les risques de dérèglement de la fonction ruminale par les matières grasses augmentent.

Le soja laminé ou grossièrement moulu est vraisemblablement le meilleur compromis pour l'alimentation des ruminants, mais les agriculteurs peuvent utiliser le soja entier. Quand il n'y a pas beaucoup de graines dans le fumier, le broyage n'est pas nécessaire. Si l'animal élimine des graines entières, il faut procéder au broyage grossier ou au laminage du soja.

CONCLUSIONS

La valeur du soja varie dans chaque cas où il est utilisé comme aliment. Elle est à son maximum lorsqu'on l'utilise dans les rations pour les animaux à haut rendement auxquels on doit servir régulièrement plus de matières grasses et plus de protéines non dégradable. La valeur du soja est plus basse dans les cas de faible productivité où il n'est pas nécessaire de servir une ration riche en matières grasses ou en protéines non dégradable.

La plupart des formulations au moindre coût fixent la valeur du soja à peu près au même niveau ou à un niveau beaucoup plus élevé que celui du SMB 48 %, compte tenu du régime en cause et des autres aliments disponibles. Le tourteau de soja demeure l'aliment qui influe le plus sur le prix du soja entier. Les prix des céréales et des matières grasses influent également sur le prix du soja, mais à un moindre degré.

Le soja constitue une bonne source d'énergie et de protéines, et il est facilement cultivable dans les Maritimes. Le soja convient à la plupart des catégories de bétail, mais il faut suivre attentivement les directives d'utilisation pour optimiser l'indice de consommation et la performance animale.