Gouvernement du Nouveau-Brunswick

Composition et valeur nutritive du lait

décembre, 1992 - /92.2
Murray Snowdon, Spécialiste en nutrition animale

PARTIE 2 - TENEUR EN PROTÉINES DU LAIT

La tendance actuelle à la consommation de produits laitiers à faible teneur en matières grasses modifiera les modalités d'établissement des prix de manière à accroître l'importance accordée à la teneur en protéines du lait. L'importante hausse de la consommation de fromages a également contribué à placer l'accent sur la teneur en protéines des produits laitiers. Heureusement, la production de matières grasses et de protéines a une corrélation génétique, ce qui signifie que l'importance accordée jusqu'ici à la teneur en matières grasses du lait aura par le fait même contribué à augmenter la teneur en protéines de ce produit.

Les taux de protéines et de matières grasses sont souvent indiqués en pourcentage par les chercheurs et par les représentants des offices de commercialisation. Cela tend à mettre l'accent sur la teneur plutôt que sur le rendement. Il faut cependant faire la distinction entre les modifications de la teneur en protéines (pourcentage) et les modifications du rendement en protéines, puisque ces deux données ne sont pas toujours influencées de la même manière.

FACTEURS GÉNÉTIQUES

Les différences entre les races quant à la teneur en protéines du lait sont moindres que pour celle en matières grasses. Cependant, cet écart est suffisamment prononcé pour créer d'importantes différences de revenu si les prix du lait sont fixés selon ses composantes. Les taux moyens par race laitière sont illustrés au tableau 1.

FACTEURS AUTRES QUE GÉNÉTIQUES ET NUTRITIFS

Les facteurs autres que génétiques et nutritifs ont le même effet que les facteurs génétiques. Ceux qui diminuent la teneur en matières grasses abaissent également la teneur en protéines et vice versa. Un résumé des facteurs autres que génétiques et nutritifs est fourni au tableau 2.

TENEUR EN PROTÉINES ET RÉGIME ALIMENTAIRE

La teneur en protéines varie moins que la teneur en matières grasses et se trouve plus difficilement modifiée par le régime alimentaire. À l'inverse des facteurs environnementaux qui tendent à avoir des effets semblables sur les taux de matières grasses et de protéines, la plupart des facteurs alimentaires ont des effets inverses sur les taux de matières grasses et protéines, c'est-à-dire que l'accroissement de la teneur en matières grasses entraîne une diminution de la teneur en protéines et vice versa.

 

TABLEAU 1 - TAUX MOYEN SELON LA RACE - TENEUR DU LAIT EN MATIÈRES GRASSES, EN PROTÉINES ET EN LACTOSE

COMPOSANTE

MATIÈRESS

HOLSTEIN

JERSEY

AYRSHIRE

GUERNSEY

GRASSES, %

3.6

4.8

3.9

4.6

PROTÉINES %

3.2 3.8

3.3

3.6

LACTOSE, %

4.7

4.9

4.9

4.9

TABLEAU 2 - EFFETS DE FACTEURS AUTRES QUE GÉNÉTIQUES ET NUTRITIFS
SUR LA TENEUR EN PROTÉINES DU LAIT

Stade de lactation

Diminution de la teneur en protéines pendant les deux premiers mois de la lactation, suivie d'une augmentation.

Âge de la vache

La teneur en protéines décroît avec l'âge.

Saison

La teneur en protéines est généralement plus basse en été et plus élevée en hiver.

Intervalle de la traite

Aucun effet.

Mammite

La teneur en protéines décroît lorsque la vache souffre de mammite.

Apport énergétique et proportion des fourrages dans la ration

On confond souvent les trois notions alimentaires suivantes: taux de fourrages, taux de céréales et apport énergétique. Cependant, la modification d'une des trois composantes entraîne généralement la modification des deux autres, ce qui veut dire qu'il est difficile de les dissocier. En général toutefois, une ration faible en fourrages, mais offrant un apport énergétique élevé augmentera la production de protéines.

Cependant, un faible apport énergétique et une forte proportion de fourrages diminueront à la fois la teneur en protéines et la production de protéines. Certains chercheurs ont constaté que, à apport énergétique égal, les sujets qui reçoivent une ration à forte proportion de fourrages produisent moins de protéines que ceux qui reçoivent une ration à forte proportion de concentré.

Teneur en protéines de la ration

La teneur en protéines du lait augmente lorsqu'on accroît la teneur en protéines alimentaires de l'animal. Cette augmentation est cependant minime, soit d'environ 0,02 p. 100 pour chaque point de pourcentage de protéines ajoutées à la ration.

La teneur accrue en protéines augmente souvent la digestibilité de la ration ainsi que la prise alimentaire, ce qui accroît l'énergie de la vache et sa production laitière. Dans un tel cas, on peut assister à une augmentation du rendement en protéines reliée à l'augmentation de la production laitière, sans pour autant que la teneur en protéines du lait soit modifiée.

En réalité, la teneur en protéines du lait des vaches qui reçoivent une ration équilibrée pour ses besoins de la production laitière n'est pas susceptible d'augmenter beaucoup par suite de l'accroissement des quantités de protéines ingérées.

Dégradation ruminale des protéines

L'augmentation du taux de protéines non-dégradable dans le rumen entraîne parfois une augmentation de la production de protéines dans le lait. Dans les cas où une telle chose se produit, l'augmentation du rendement protéique peut être dû soit à l'accroissement du volume de lait ou à une augmentation du taux de protéines dans le lait, ou les deux. Malheureusement, les résultats ne sont pas constants, ce qui rend difficile l'établissement de recommandations précises. En fournissant aux animaux des protéines non-dégradable dans le rumen bien équilibrées en acides aminés, on accroît les chances d'augmenter la production de protéines. La farine de poisson est une source de protéines intéressante.

Consommation d'acides aminés

L'évaluation des besoins en protéines en fonction des acides aminés qui les composent constitue une approche plus détaillée. Ce n'est que récemment que les nutritionnistes ont commencé à prendre cette approche au sérieux. Les objectifs de production d'aujourd'hui nous obligent à examiner cette question de plus près afin d'essayer de comprendre les besoins des vaches hautement productives.

Puisque la présence d'acides aminés résistant à la rumination est nécessaire pour une forte production de lait, on a effectué des recherches poussées sur ce type d'acides aminés.

Bien que la production de lait augmente parfois lorsqu'on fournit des acides aminés résistant à la rumination (habituellement de la méthionine ou de la lysine), les résultats sont variables et peu concluants. Cependant, les recherches actuelles pourraient permettre d'établir des programmes d'équilibrage des rations et des systèmes d'analyse de l'alimentation. Ceci permettrait de prédire le moment propice à l'augmentation de la production grâce à un supplément d'acides aminés.

Des entreprises utilisent des acides aminés résistant à la rumination, notamment la méthionine, dans des suppléments en couverture et dans des aliments de qualité supérieure.

Consommation de gras

La consommation de gras entraîne souvent une baisse du taux de protéines dans le lait, et ce, quelle qu'en soit la source. Les oléagineux, l'huile libre et le gras protégé ont tous pour effet de réduire le taux de protéines dans le lait. Cependant, puisque la production de lait augmente souvent avec la consommation de gras, le rendement en protéines peut demeurer stable ou même augmenter en dépit d'une baisse du taux de protéines.

CONCLUSION

Dans l'avenir, l'importance accordée par les producteurs aux différentes composantes du lait dépendra en grande partie des tendances du marché et de la demande pour les reproducteurs. Bien que le rendement exprimé en pourcentage soit utile dans le cadre de certains systèmes de quotas, le rendement réel en kilogrammes des composantes du lait doit être utilisé pour mesurer l'effet des modifications du régime alimentaire.

Par le passé, on se préoccupait peu de la teneur en protéines du lait; les résultats de nombreuses recherches n'incluent même pas la teneur en protéines du lait testé. C'est pourquoi on connaît moins bien les mécanismes régissant la teneur en protéines que ceux régissant la teneur en matières grasses. La recherche dans l'avenir présentera de grands défis si l'on tente d'augmenter la teneur en protéines tout en réduisant la teneur en matières grasses.

La plupart des systèmes d'équilibrage des rations pour vaches laitières ne tiennent pas compte du taux de protéines du lait dans leurs recommandations alimentaires. À mesure que nous accorderons plus d'importance à la teneur en protéines et que nous maîtriserons mieux les mécanismes qui la régissent, cette donnée sera de plus en plus souvent incluse dans les programmes de formulation des rations.

Bien que la façon la plus sûre d'augmenter la teneur et le rendement en protéines soit d'adopter un régime visant à réduire la teneur en matières grasses, on ne recommande pas une telle approche. Un tel régime tend à acidifier le rumen, à réduire la digestibilité des fourrages, à créer des problèmes à la fin du régime, et à entraîner des problèmes aux membres et aux sabots.

Bien que les manipulations alimentaires tendent à faire diverger les teneurs en matières grasses et en protéines, on voit souvent des troupeaux dont la MCR est exceptionnellement élevée pour la production de lait, de matières grasses et de protéines. C'est là une preuve qu'une bonne combinaison génétique et alimentaire ainsi qu'une bonne gestion permettent d'obtenir un rendement élevé pour tous les paramètres de production.  Bref, il est difficile d'augmenter le rendement en protéines sans sacrifier le rendement en matières grasses. Les conseils qui suivent peuvent toutefois être utiles aux producteurs qui désirent tenter leur chance dans ce domaine.

  1. Choisissez des taureaux reproducteurs susceptibles d'améliorer la production en protéines du troupeau. La production de protéines est un trait héréditaire, à l'instar de la production de matières grasses.
  2. Fournissez aux vaches en début de lactation une ration à haute teneur en protéines (17 à 19 p. 100).
  3. Veillez à ce que les vaches en début de lactation reçoivent une quantité adéquate de protéines non-dégradable dans le rumen de bonne qualité. Les produits les plus utilisés sont les farines à base de poisson, de viande, d'os et de sang.
  4. Faites l'essai d'acides aminés protégés comme la lysine et la méthionine, qui peuvent s'avérer bénéfiques, surtout dans le cas des vaches hautement productives.
  5. Si vous possédez un troupeau très productif, ajoutez des matières grasses à la ration. Il faut cependant savoir qu'un régime à forte teneur en matières grasses risque d'entraîner une baisse de la teneur en protéines du lait et peut-être même une baisse du rendement en protéines. Les résultats de certaines études indiquent cependant qu'on peut réduire ce risque en ajoutant de la niacine ou de la farine de poisson à l'alimentation.

LECTURES ADDITIONNELLES

Les effets de l'alimentation sur la production de protéines est une question complexe. Les choses se compliquent encore lorsqu'on tente d'établir la différence entre les effets sur la teneur en protéines et les effets sur le rendement en protéines. Les personnes qui désirent plus d'information à ce sujet sont invitées à faire les lectures suivantes:

  1. DePeters, E.J. et Cant, P.J. 1992, Nutritional Factors Influencing the Nitrogen Composition of Bovine Milk:A Review, J. Dairy Sci. 75:2043-2070.
  2. Emery, R. S., 1978, Feeding for Increased Milk Protein, J. Dairy Sci. 61:825.
  3. Linn, James G., 1989, Altering the Composition of Milk Through Management Practice, Feedstuffs, July 17, 1989.